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« Gauheria » rappelle la venue de réfugiés du Pas-de-Calais à Douai en 1914-1918

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photo pascale bréemersch et bernard ghienne montrent le registre recensant les noms des réfugiés conservé aux archives municipales. © la voix du nord 1

Pascale Bréemersch et Bernard Ghienne montrent le registre recensant les noms des réfugiés conservé aux archives municipales. © La Voix du Nord

La revue « Gauheria », dans son dernier numéro, revient sur un épisode méconnu de la Grande Guerre : le déplacement de centaines de réfugiés du Pas-de-Calais sur Douai occupé. Elle donne le nom de toutes ces personnes soigneusement recensées dans un registre.

PAR JEAN-LUC ROCHAT

douai@lavoixdunord.fr

C'est un registre grand format, d'épaisseur moyenne, conservé aux archives municipales. Par chance, ce document a échappé aux saccages commis par les Allemands lors de leur départ précipité de la ville, en octobre 1918. Il a conservé le souvenir de centaines et de centaines de réfugiés, principalement du Pas-de-Calais, souvent déplacés de force à Douai par les Allemands. Gauheria, une association qui publie une revue d'histoire et d'archéologie de la Gohelle (Gauheria en latin) a, dans le dernier numéro de cette revue du même nom, eu la bonne idée de donner l'identité de ces réfugiés, classés par communes, se concentrant sur ceux du Pas-de-Calais. Sur les presque 1 700 noms inscrits à la plume dans ce registre, 1 336 sont originaires de ce département. « On est cependant sûrs qu'il y a eu plus de réfugiés que les près de 1 700 enregistrés », indique Pascale Bréemersch, la directrice des archives municipales, corédactrice avec Bernard Ghienne, secrétaire de Gauheria, de cet article.

En 1914, les affrontements furieux qui se déroulent dans la région, lors de la « course à la mer » (lire ci-dessous) provoquent à Douai un afflux de réfugiés venus d'abord du Pas-de-Calais. La ligne de front s'étendant au Nord - Pas-de-Calais, les Allemands se débarrassent des civils, toujours gênants dans une zone de combats. Ils règlent le problème à leur manière en évacuant ces personnes sur des villes françaises occupées, dont Douai. Peu importe que celle-ci doive faire face à d'importants problèmes, dont notamment celui du ravitaillement.

« Le 26 novembre 1914, plusieurs centaines de réfugiés arrivent de trois communes proches d'Arras : 125 de Saint-Laurent-Blangy, 247 d'Athies et 40 de Thélus », précise Mme Bréemersch. Le maire, Charles Bertin, crée immédiatement un comité de secours. « Il a rassemblé les notables, y compris les francs-maçons et le chanoine », continue Mme Bréemersch. « L'arrivée de ces réfugiés a rendu la vie des Douaisiens plus difficile. Mais au départ, ils provoquent un mouvement de compassion. Les Douaisiens ont pitié d'eux. Ils sont d'abord logés dans le centre, dans les habitations vides des Douaisiens partis, puis dans les quartiers périphériques au fur et à mesure des arrivées. » Néanmoins, vu le contexte, les conditions de vie sont rudes. « On entasse des gens à l'école des maîtres mineurs, rue Victor-Hugo », précise M. Ghienne qui, en appui de ses propos, lit les commentaires d'un Douaisien, Jules Limbour, qui a tenu un journal durant la guerre. « À l'école des maîtres mineurs, où des évacués de Saint-Laurent, d'Athies, etc. sont campés, c'est le froid et la faim. Trois cents personnes y vivent entassés. Je viens de voir à l'hôpital général une salle en sous-sol où grouille, entassée, une centaine d'enfants sans air et presque sans lumière. Personne n'est là qui les aide », écrit-il en janvier 1915. M. Ghienne souligne la mauvaise santé des réfugiés : « Beaucoup de vieillards arrivés à Douai meurent dans les trois mois. » Au fur et à mesure, d'autres réfugiés du Pas-de-Calais, cette fois de la région de Lens, arrivent à Douai. La ville, à son tour, en transfère une partie vers d'autres cités occupées (Cambrai, Denain) ou en France non occupée, avec l'autorisation des Allemands bien sûr. Ce qui suscite des réactions inattendues. Des réfugiés de Saint-Laurent-Blangy signent ainsi une pétition : « Les soussignés sont restés à Saint-Laurent-Blangy jusqu'à la fin novembre 1914 et n'en sont partis que contraints et forcés par la mitraille. Ils sont accourus à la ville de Douai qu'ils connaissaient comme si hospitalière (...). Ne pourriez-vous pas, Monsieur le maire, garder ceux-là qui sont ici depuis 17 mois et faire partir ceux qui sont arrivés les derniers ? » •

La revue est disponible à la librairie Brunet (8 E). Elle peut être commandée sur le site Internet www.gauheria.com.

 
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