Un pédophile dans la bergerie... |
Un pédophile hébergé dans la chambre d'une fillette à Issoire : trois ans de prison. Le père soupçonné d'agression incestueuse : relaxé.
Un père de famille qui fait des bisous « qui pètent » sur le ventre et mordille les fesses de sa fillette de 5 ans le dimanche matin, dans le lit conjugal, se rend-il coupable d'une agression sexuelle ?
« J'espère que non ! » rétorque Me Libert « ou il faudra mettre beaucoup de pères en prison ». Celui qu'elle défend, 56 ans, a comparu, jeudi, devant le tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand, pour agression sexuelle incestueuse sur sa fillette, Issoire, entre janvier 2003 et 2 005.
Le juge d'instruction, au terme de six années, a estimé, contre l'avis du parquet qui a pris des réquisitions de non lieu, qu'il y avait des présomptions suffisantes au renvoi de ce père de famille devant le tribunal.
C'est vrai que « l'affaire est complexe » reconnaît Me Libert. « Elle a duré dans le temps, il y a un contexte éducatif clairement problématique et il y a deux affaires en une ». En effet, le père n'est pas le seul prévenu. Dans le box, comparaît un homme de 63 ans en train de purger une peine de 12 ans de prison à Poitiers pour avoir violé ces deux enfants entre 1981 et 1990.
« C'est le loup dans la bergerie » décrit Me Antoine Portal, son avocat. « C'est même un loup que l'on a invité, que l'on a attablé ! ». En effet, pour dépanner, en 2005 et 2006, il est hébergé quelques nuits dans cette famille d'Issoire. À cette époque, il n'a pas encore été condamné. La famille lui offre un lit dans la chambre de la petite. Il reconnaît qu'il a fait des bisous, que la fillette lui en a faits, qu'il a « utilisé » ses cuisses. « L'enfant semblait aimer », dit-il. « Comment s'est-elle retrouvée dans votre lit ? ». « Elle est venue ». Qui a enlevé son pyjama ? ». « Je ne sais pas ». La présidente Nadine Valiergue devra se contenter de ça.
Le parquet requiert 4 ans de prison dont deux ans assortis d'un sursis mise à l'épreuve. Il est condamné à 3 ans de prison.
« C'est sûr, on a fait une bêtise. On ne pouvait pas imaginer, il a l'âge d'être son grand-père » assure le père de famille à la barre. « Il dit que votre fille se comportait comme si elle avait 13 ou 14 ans, ça pose question. Avait-elle l'habitude ? » questionne la présidente. « Non ».
Le problème, c'est que, au moment du premier signalement de l'enfant, à l'école, fin 2005, le pédophile n'est pas encore entré dans la vie de la famille.
Dans deux auditions, elle va parler de bisous, de langue qui traîne là où elle ne doit pas y être. En 2009 et en mars 2011, la fillette se rétracte. « Elle grandit, veut tourner la page. Et puis on lui parle de papa qui risque d'aller en prison, de placement dont elle pourrait faire l'objet » relève Me Martine Ardaillon, partie civile pour une association de victimes.
À la barre, le père qui admet aimer les bisous du dimanche matin, nie être « un pervers », « un agresseur sexuel ». Le juge des enfants l'a cru en 2007 en rendant un non-lieu sur la procédure d'assistance éducative. Le tribunal correctionnel a sans doute estimé qu'il n'y avait pas assez d'éléments au dossier pour asseoir la culpabilité de cet homme. Il est relaxé. n