L’Aide médicale aux sans-papiers bientôt réformée ?... |
Le candidat à la présidence, Emmanuel Macron, a promis en 2017, de ne pas toucher à l’Aide médicale d’État (AME), qui concerne plus de 300 000 personnes en situation irrégulière en France. Pourtant, la future remise d’un rapport inquiète les associations.
Va-t-on vers une réduction de l’Aide médicale d’État ? Un peu plus d’un mois avant la remise du rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur le sujet, les associations montent au créneau.
Qui peut bénéficier de l’AME ?
Créée par le gouvernement Jospin en 1999, l’AME est une aide sociale qui offre, a plus de 300 000 personnes en situation irrégulière, la couverture et la prise en charge de leurs soins. Pour en bénéficier, il faut résider sur le sol français (hors Mayotte) depuis trois mois de manière ininterrompue, et percevoir un revenu inférieur à 720 €. « Déjà, il faut savoir que l’AME existe, pouvoir donner une adresse, prouver qu’on est bien en France depuis trois mois, alors que ce sont des personnes précaires qui vivent dans des squats, bidonvilles ou dans la rue », explique Nathalie Godard, responsable du pôle appui et politiques publiques à Médecins du Monde. « Bien souvent, ces personnes ne parlent pas la langue et ont des difficultés à réunir les pièces justificatives », ajoute-t-elle.
Quel est son budget ?
L’AME, qui ne fait pas partie de l’assurance maladie, subit régulièrement des attaques pour son coût supposé sur le budget de l’État mais est défendue vigoureusement par la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, qui s’est toujours prononcée en faveur de son maintien. Avec un budget de 943 millions d’euros en 2018, le dispositif correspond, à titre de comparaison, à 0,47 % du budget de la Sécurité sociale qui culminait, en 2016, à plus de 180 milliards d’euros.
« Quand on parle du trou de la sécurité sociale aujourd’hui, cela n’inclut pas l’AME car elle ne fait pas partie du budget de l’assurance maladie », précise Nathalie Godard. Responsable du plaidoyer dans l’association Aides, Caroline Izambert va dans le même sens. « C’est vraiment le milliard le plus scruté de la protection sociale ! », lance-t-elle, avant d’expliquer : « Le budget est en augmentation c’est vrai, mais on est dans un contexte où être régularisé en France est de plus en plus dur. »
Quelles sont les pistes envisagées ?
Trois pistes ont été évoquées durant les auditions avec les acteurs concernés. Tout d’abord, l’introduction d’un ticket modérateur avec un reste à charge pour le patient. Puis, une diminution du panier de soins pris en charge. Un panier déjà amputé de certains soins, notamment dentaires, et de la PMA. Enfin, la création de centres de santé dédiés a été étudiée.
« Dans le contexte actuel, dire aux sans-papiers que leur seul accès à la santé ce sont les urgences, ça nous semble ni bon pour les personnes précaires, ni bon pour l’organisation du système de santé », affirme Caroline Izambert. « Les sans-papiers attendront plus longtemps avant de se soigner, leur maladie sera donc plus aiguë, poursuit Nathalie Godard. La prise en charge se fera en urgence et coûtera, au final, beaucoup plus cher. »
Toutes deux ont été marquées, durant les auditions, de voir une vraie volonté de proposition, de réforme, de la part de la mission. Le comparatif avec les pays étrangers est aussi revenu fréquemment sur la table.
La mission, confiée à l’Inspection générale des finances, et l’Inspection générale des affaires sociales, doit remettre son rapport entre septembre et octobre. Un timing inquiétant pour les associations car il concorde avec le projet de loi finances et le débat sur l’immigration. Médecins du monde prévient déjà que « toute attaque visant à ramener une réduction de l’application de l’AME, est un risque de santé publique. Ceux qui bénéficient de l’AME sont exposés à des risques sanitaires importants. Ils doivent donc avoir plus facilement accès aux soins plutôt que de voir cette action mise en danger. »