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Cyclisme. Le Français Roger Pingeon résiste à Luis Ocaña et remporte la Vuelta le 11 mai 1969... |

Roger Pingeon sur les routes du Tour d’Espagne en 1969. © AFP
Le vainqueur du Tour de France 1967 remporte deux ans plus tard le Tour d’Espagne, complétant ainsi un joli palmarès. Sur cette Vuelta conclue le dimanche 11 mai 1969, le Français Roger Pingeon a résisté au jeune Espagnol Luis Ocaña bien qu’il soit diminué par une angine.
Le Bressan Roger Pingeon, en remportant le Tour de France 1967, a causé une grande surprise. Ce Tour, revenu aux équipes nationales, on le promettait à Raymond Poulidor puisque Jacques Anquetil avait renoncé à y participer… Mais grâce à une échappée victorieuse entre Roubaix et la Belgique, Pingeon s’était imposé comme leader de l’équipe de France et il avait tenu aussi habilement que courageusement son rang jusqu’à Paris. « Sans le Tour de France, j’aurais été un homme comme les autres », dira plus tard Roger Pingeon, garçon modeste passé d’apprenti plombier à coureur professionnel dans l’équipe Peugeot à 24 ans en 1964 où il côtoya pendant deux ans un jeune Belge nommé Eddy Merckx.
En 1968, Roger Pingeon a gagné deux étapes du Tour de France qu’il a terminé cette fois en cinquième position à Paris. Mais en 1969, il montre qu’il n’est pas un champion de passage. Deux mois avant le Tour, il est inscrit pour la première fois à la Vuelta qui se dispute du 23 avril au 11 mai, avec l’équipe Peugeot. Troisième du prologue de 6,5 km à Badajoz, en Extramadure à la frontière du Portugal, il n’est devancé que d’une seconde par Luis Ocaña, jeune Espagnol fougueux et téméraire de l’équipe Fagor.
Une étape de transition fait son affaire
Entouré de Désiré Letort, Jean-Claude Daunat, André Desvages, René Pinazzo, Henri Rabaute, René Grenier, René Pingeon (son frère) et des Belges Joseph Schoeters et Willy Monty, Roger Pingeon fait ensuite une course prudente jusqu’à la 12e étape, en Catalogne, qui va de Sant Feliú de Guíxols à Moià. Ce n’est a priori qu’une étape de transition, mais comme lors du Tour de France 67, Pingeon la met à profit pour se lancer dans une longue échappée où il sème au fur et à mesure tous les coureurs qu’il l’accompagnait, dont Luis Ocaña.
S’il perd trois de ses équipiers, hors délais dans l’affaire, il creuse les écarts en tête de course et s’impose en solitaire avec 2’49’’ sur le Britannique Michael Wright. Ocaña, lui, perd 4’17’’ ! Pingeon a frappé un grand coup et s’est emparé du maillot « amarillo » de leader.

Roger Pingeon remporte le Tour d’Espagne après avoir remporté le Tour de France deux ans plus tôt AFP
Mais il reste encore huit étapes à parcourir d’ici l’arrivée finale à Bilbao et Ocaña est loin de renoncer et il attaque Pingeon contraint à la défensive, d’autant qu’une épidémie d’angine décime son équipe. Au point que le dernier jour, il ne restera à Pingeon qu’un seul équipier à ses côtés, le Belge Willy Monty !
Trois jours après sa prise de pouvoir, un petit contre-la-montre de 4 km à Saragosse confirme que Pingeon est bien là pour remporter le Tour d’Espagne : il devance à nouveau Luis Ocaña, de six secondes. L’Espagnol lui reprend néanmoins un peu de temps dans un autre contre-la-montre, escarpé, entre Irun et Saint-Sébastien : 34 secondes sur 25 km, mais cela est encore insuffisant pour déloger Pingeon de la première place, qu’il conserve une avance de 3’48’’. Un ultime contre-la-montre, à Bilbao, est le juge de paix de cette Vuelta le dimanche 11 mai 1969.
Pingeon, affaibli par l’angine, est en position de faiblesse et Luis Ocaña, cette fois, l’emporte plus largement. Pingeon cède 1’54’’ sur 29 km, mais c’est exactement l’avance qu’il conserve au classement final ! Après Jean Dotto (1955), Jean Stablinski (1958), Jacques Anquetil (1963) et Raymond Poulidor (1964), il est ainsi le cinquième Français à triompher du Tour d’Espagne.
Le dernier opposant de Merckx sur le Tour
Après cette Vuelta victorieuse, Pingeon fera un Tour de France 1969 courageux face à Eddy Merckx. Il sera le dernier adversaire du nouveau maître du cyclisme mondial. Sa deuxième place à Paris sera saluée, mais moins aimé et estimé que Raymond Poulidor, Roger Pingeon déclinera ensuite pour rejoindre les rangs des anonymes. « Quand vous interrogez Eddy Merckx, celui qui l’a le plus impressionné, c’est Pingeon, dira pourtant plus tard, Raymond Poulidor. Franchement, quand Roger envoyait les « ripatons », c’était quelque chose… »
Luis Ocaña, qui remportera la Tour d’Espagne en 1970, reprendra le flambeau de la lutte anti-Merckx qu’il inquiétera sérieusement sur le Tour en 1971 avant d’abonner dans les Pyrénées. Mais il remportera le Tour en 1973, en l’absence de Merckx, réalisant ainsi le même doublé que Pingeon et qui échappera toujours à Poulidor…
Le classement final de la Vuelta 1969
1. Roger Pingeon (Peugeot) ; 2. Luis Ocaña (Esp, Fagor) à 1’54’’ : 3. Marinus Wagtmans (PB, Willem II) à 5’10’’ ; 4. José Manuel Lasa (Esp, Pepsi-Cola) à 5’10’’ ; 5. Michael Wright (GB, Bic) à 5’27’’ ; 6. Rolf Wolfshohl (All, Bic) à 6’11’’; 7. Gilbert Bellone (Bic) à 6’47’’ ; 8. Gregorio San Miguel (Esp, KAS) à 7’05’’ ; 9. Carlos Echeverría (Esp, KAS) à 7’35’’ ; 10. Eusebio Vélez (Esp, Fagor) à 7’51’’.